Remonter à la genèse de l’Éducation en forêt serait un sujet de recherche à part entière. D’aucuns en attribuent l’origine au mouvement initié par l’école de Laona, dans le Wisconsin, dans les années 20, quand d’autres citent Ella Flautau, qui dans les années 50 réinventa le Kindergarten, le ‘jardin d’enfants’ (qu’avait imaginé le pédagogue allemand Friedrich Fröbel). Dans la même période, les écoles en forêt se sont développées au Danemark avec l’implantation de la première skovbørnehaver dans la banlieue de Copenhague en 1952. Les forest schools ont fait leur apparition au Royaume-Uni dans les années 90.
Depuis, le phénomène a fait des émules : on compte aujourd’hui 3 000 écoles dans la forêt en Europe, dont 2 000 en Allemagne ; elles rencontrent également un joli succès en Angleterre, en Suisse et en Autriche.
En France, il n’y a pas de forest school telles qu’elles peuvent exister aux États-Unis ou dans les pays scandinaves. Par définition le concept même de la forest school est l’unschooling, appelé aussi ‘apprentissages autonomes’ ou ‘éducation auto-gérée’, et qui peut être traduit par ‘déscolarisation’. Le but est de laisser les enfants découvrir et apprendre de façon naturelle et non dirigée. Ce que le système scolaire français n’autorise pas. Même les écoles dites ‘alternatives’ qui se développent largement en France, sont tenues de respecter la progression des programmes scolaires ainsi que l’évaluation des compétences de leurs élèves.
J’ai toujours trouvé étonnant que des médias spécialisés fassent l’éloge des systèmes éducatifs nordiques sans informer sur les raisons qui font qu’en France, de tels systèmes ne puissent exister. À l’heure de la promulgation de lois visant à interdire l’Instruction En Famille (IEF), une École dans la FORÊT de type forest school n’est pas près de voir le jour en France. Convaincus du bien-fondé de la conduite dirigée ou semi-dirigée des enfants par le corps enseignant (ce qu’on appelle la pédagogie), et de la nécessité de ces conduites dans les apprentissages, le système éducatif français ne conçoit pas que la FORÊT puisse être l’acteur même de la pédagogie. Toutefois il concède qu’elle puisse être un des moyens pédagogiques parmi d’autres. D’où le terme de Pédagogie Par la Nature (PPN), spécifiquement francophone, qui depuis le covid, a été repris par les établissements scolaires publics, avec la pratique de la ‘classe en extérieur’.
Bien que je n’aie aucun parti pris sur une pratique en particulier, il me semble nécessaire de souligner ici l’évolution qui s’est opérée sur le rôle de la Forêt dans l’éducation des enfants. Si nous comparons les différents modes opératoires, ‘Apprendre DE LA Forêt’ n’est pas la même chose ‘qu‘Apprendre DANS LA Nature’ qui n’est pas la même chose ‘qu‘Apprendre PAR la Nature’. Il est question : de la place de l’enfant / du rôle de l’environnement / de la fonction du cadre scolaire… Lequel de ces trois acteurs est au cœur des pratiques ?
De la Forest school à la Pédagogie DANS la Nature ou à la Classe en extérieur, le mode opératoire de l’Éducation en forêt s’est sensiblement adapté en fonction des spécificités culturelles. Nous assistons donc depuis quelque temps à l’émergence de sous-courants, ayant tous pour objectif, l’épanouissement des enfants !
Le courant de la pédagogie ‘à ciel ouvert’, comme la nomment les Québécois, s’appuie sur le constat que notre génération est la première qui grandit avec peu ou pas d’expériences directes avec la nature. L’homme ‘hors-sol’ est né ! Il en résulte ce que le journaliste Richard Louv appelle le ‘syndrome de manque de nature’ (the nature-deficit disorder). Or la nature nous offre l’expérience de grandir de façon holistique : apprendre et comprendre avec le corps et la tête en mouvement, le cœur ouvert. C’est mieux connaître la nature pour la respecter et ainsi développer une attitude éco-responsable. Que ce soit en immersion totale en forêt, ou partiellement dans la nature, voire en intégrant l’environnement proche de l’école, la Pédagogie Par la Nature est une approche spécifique exigeante, fondée sur des principes et des valeurs incluant : l’observation, l’accompagnement réfléchi et bienveillant et le respect du rythme des participants, au travers d’activités d’exploration s’inscrivant dans le temps.
Nombreux sont les pédagogues, qui par le monde, ont célébré le lien au Vivant. La pédagogie par et dans la nature est l’héritage d’une pratique européenne et mondiale qui remonte à bien longtemps. Certaines de ces pratiques, comme l’approche sensorielle ou le jeu libre (arrivée en France avec la traduction des livres de Joseph Cornell dans les années 70-80), sont présentes dans l’éducation à l’environnement en France depuis de nombreuses années. D’autres, comme l’éducation centrée sur les besoins de l’enfant et l’approche holistique dans l’éducation, trouvent leur source dans la psychologie humaniste de Carl Rogers, entre autres.
On pourrait citer – Maria Montessori qui recommandait de confier l’enfant à la nature en cas d’absence d’éducateurs bienveillants – Loris Malaguzzi, fondateur de la pédagogie Reggio Emilia qui privilégie la libre circulation entre l’espace intérieur et extérieur – moins connue, Charlotte Mason dont les préceptes ont été largement repris dans les méthodes de homeschooling.
En France, de plus en plus d’écoles dites ‘alternatives’ expérimentent le lien à la nature en tant qu’entrée dans les apprentissages. Il est indiscutable qu‘ ‘apprendre dans et par la nature’ est générateur d’enthousiasme, de motivation et d’émerveillement. Le lien à la nature, à soi et aux autres prend alors tout son sens.
Les structures éducatives disposent pour la plupart d’une charte de valeur personnelle, qui explicite clairement les principes retenus et mis en œuvre au travers des activités proposées.
En 2018, un RÉSEAU DES PÉDAGOGUES DE LA NATURE (RPPN) s’est constitué en France. Ses missions consistent : à promouvoir les principes et les bénéfices de la PPN ainsi qu’à fédérer les structures pratiquantes en France comme à l’international. Il est un centre-ressource, facilitant les échanges, nourrissant la réflexion professionnelle. Il compte en son sein de nombreuses actrices engagées et organisées par régions. En tant que membre, je peux vous témoigner du sérieux de ce réseau qui milite pour une qualité d’accompagnement des enfants en nature. Adhérer au RPPN : c’est l’assurance d’évoluer dans sa pratique professionnelle selon des principes éprouvés relevant d’un cadre respectueux, imaginatif et sécure ; et de se sentir légitime dans sa posture d’éducatrice par et dans la nature auprès des familles mais aussi d’institutions.
Les principes fondamentaux énoncés par le RPPN (fondés sur l’observation des apprentissages, sur l’accompagnement réfléchi et bienveillant ainsi que sur le respect du rythme des participants) m’évoquent aussi bien les principes transmis en permaculture que ceux promus par des pratiques d’expression picturale, dont le Jeu de peindre d’Arno Stern et le Védic Art® de Curt Källman qu’en tant que passeuse, je connais bien.
Rédiger ces quelques mots me fait prendre conscience de l’existence de valeurs communes à ces 3 pratiques, comme si en leur cœur même… vibrait une unité ! Chacune à sa manière, selon ses propres préceptes, avec son vocabulaire, concourrait à l’émergence d’une philosophie universelle.
Les 7 principes du Réseau Français de Pédagogie Par la Nature
https://www.reseau-pedagogie-nature.org/
Un lieu naturel inspirant,
La récurrence et le temps long,
Les participants au cœur des pratiques,
Le processus, pas le résultat,
Le jeu libre,
La prise de risque mesurée,
La présence de l’adulte.
Pas de spams, juste les actualités de mon blog !
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